Le travail de la posture (站桩 zhàn zhuāng) dans le Xing Yi Quan

En Xing Yi Quan, la pra­tique de pos­ture se nomme San Ti Shi. 三体式. La porte pour entrer dans le calme (入靜, rù jìng) réside dans l’état de non-action (无为, wú wéi) face à nos expériences.

La pra­tique du non-faire c’est apprendre à s’abandonner (舍, shě). Le plus impor­tant étant d’abandonner l’idée de chan­ger les choses. La pra­tique de l’abandon (ou renon­ce­ment), c’est de ni lâcher ni résis­ter (不丢不顶, bu diū bù dǐng). On n’est pas debout « bête­ment », sans rien faire. A l’inverse, on est com­plè­te­ment alerte, plei­ne­ment atten­tif à l’activité en cours et en même temps sans ten­sion inutile ni lutte intérieure.

C’est là que réside la porte de la vraie tran­quilli­té. Dans la clar­té de notre champ de conscience en expan­sion, l’ac­tion juste (正業, zhèng yè) ou l’ac­tion de la non-action (无为之为, wú wéi zhī wéi) appa­raissent spon­ta­né­ment (自然, zì rán).

Il existe deux types de pra­tiques de San Ti Shi : une pra­tique sta­tique et l’autre dyna­mique. La dyna­mique est essen­tiel­le­ment d’al­ler et venir entre la contrac­tion et l’ex­pan­sion d’un côté à l’autre pen­dant une courte période (10 res­pi­ra­tions ou plus) dans chaque posi­tion. Tan­dis que la pra­tique sta­tique signi­fie un temps beau­coup plus long dans la pos­ture de San Ti. Sun Jian Yun a recom­man­dé une heure de San Ti tous les jours, mais a décla­ré que son père pou­vait res­ter par­fois 4–5 heures sans interruption.

Dans « La vraie signi­fi­ca­tion des arts mar­tiaux internes », Sun Lu Tang dit :  » Et c’est ain­si que cet art de la « boxe » est un conti­nuum unique, à la fois interne et externe. Le mou­ve­ment et l’im­mo­bi­li­té ont la même source. La forme et la fonc­tion ont la même méthode. Par consé­quent, il est vrai que « la tran­quilli­té est la forme fon­da­men­tale et le mou­ve­ment est la fonc­tion ».  » 1

Les 4 postures dans la pratique de San Ti Shi

Lorsque vous pra­ti­quez San Ti, vous faites la tran­si­tion entre 4 pos­tures, c’est-à-dire :

1. Position de vide (無極桩, wú jí zhuāng)

Wu Ji Shi

Un texte fon­da­teur de Xíng Yì Quán dit :

La non-pola­ri­té est l’é­tat dans lequel vous vous trou­vez avant de com­men­cer la pra­tique, sans pen­sée ou idée, sans forme, sans un sens de « moi » ou « lui ». Dans l’es­prit, tout est sans dis­tinc­tion, sans inten­tion et sans pen­sée … En posi­tion de départ, com­men­cez par faire face par­fai­te­ment, vos mains pen­dantes, vos pieds posi­tion­nés à un angle de quatre-vingt degrés. Cette pos­ture accom­pagne ce qui est naturel.

Avant de com­men­cer à diri­ger notre inten­tion et créer, nous devons reve­nir à notre moi ori­gi­nel, sinon nos actions seront rem­plies par les « obs­cu­ri­tés » de l’es­prit de tous les jours. La posi­tion de vide est comme le « juste assis » du Zen, reve­nir à notre visage ori­gi­nel, avant que nos parents ne soient nés. Sun Lu Tang parle de ce retour en tant que nì yùn (逆 運) en tour­nant le méca­nisme du Qi du Ciel Pos­té­rieur (c’est-à-dire le mani­fes­té), on peut retour­ner au Ciel Anté­rieur (le non mani­fes­té) et de là, au retour vers la source ori­gi­nelle (復出歸元).

2. La posture du vide qui contient le Qi Unique (虛無含一氣, xū wú hán yī qì)

Xu Wu Han Yi Qi

Un texte sur le Xing Yi Quan dit :

Lorsque le vide donne lieu à une éner­gie unique, c’est le mou­ve­ment de ren­ver­se­ment du Qi véri­table du Ciel Pré­na­tal. L’éner­gie unique n’est pas une éner­gie morte, mais une éner­gie vivante, car il y a une vita­li­té conser­vée, appe­lée Éner­gie Innée Authen­tique. C’est la base de la vie humaine, l’o­ri­gine de la nature, la clé de la créa­tion de la trans­for­ma­tion, source de la vie et de la mort. Ce sont les fon­da­tions du Xing Yi Quan. Quand il est sur le point de bou­ger, mais pas encore en mou­ve­ment, l’es­prit est vide. Le Qi est le Chaos Pri­mor­dial (一氣 渾然).

Il est dit également :

À par­tir de la posi­tion de départ, tour­nez à mi-che­min vers la droite, les mains pen­dantes, le pied gauche devant et en se rap­pro­chant de la che­ville droite jus­qu’à ce que vos pieds aient main­te­nant un angle de qua­rante-cinq degrés. À l’in­té­rieur, votre langue touche votre palais supé­rieur et votre péri­née (rec­tum) est sou­le­vé. Cette pos­ture consiste à sai­sir les aspects pas­sifs et actifs et à les trans­for­mer, en inver­sant Qian (Ciel) et Kun (Terre). En tour­nant les éner­gies et en reve­nant ain­si à l’éner­gie active véri­table (innée), à la place de l’éner­gie active fausse (acquise) qui nous est si nuisible.

3. La posture de la Plénitude ou de l’étreinte de la tête du tigre (太極桩 ou 虎抱头)

Taiji Zuang

Un texte sur le Xing Yi Quan dit :

La méthode du corps dans la posi­tion de départ passe de l’im­mo­bi­li­té au mou­ve­ment. Vous ne devez pas vous pen­cher en avant ou en arrière, ou vous incli­ner vers la gauche ou vers la droite. Vous devez être équi­li­bré et ne pas perdre votre équi­libre, debout, cen­tré et ne pas vous pen­cher. Votre pied gauche est en face, votre pied droit der­rière. Votre talon gauche est proche de votre che­ville droite, avec un angle de qua­rante-cinq degrés, comme dans la pho­to. Vos épaules se des­serrent et ont une éner­gie de des­cente. Vos coudes sont proches de vos côtes. Vos mains couvrent votre plexus solaire, la main gauche des­sous, la main droite sur le des­sus. Votre index gauche s’é­tend vers l’a­vant (en des­sous) et votre majeur droit s’é­tend vers l’a­vant éga­le­ment (au des­sus), cou­vrant votre index gauche, les deux doigts se réunis­sant. Votre tête doit être pous­sée vers le haut et votre cou doit être éti­ré (droit). Votre taille a une éner­gie de relâ­che­ment vers le bas. Vos hanches ont une éner­gie de concen­tra­tion vers l’in­té­rieur. Vos talons ont une éner­gie de tor­sion vers l’ex­té­rieur. Vos jambes se flé­chissent len­te­ment vers le bas, comme dans la pho­to. La flexion de vos jambes doit avoir une ron­deur « pleine » (sans pli « mort » ou cas­sure). Votre corps ne doit tou­jours pas avoir la moindre cour­bure, ni le moindre effort dans votre esprit.

Au cours de cette posi­tion de départ, votre inten­tion est d’être comme un poteau ver­ti­cal qui a été plan­té sur un ter­rain plat. Une fois que ce poteau com­mence à res­ter stable, votre esprit et votre éner­gie deviennent natu­rel­le­ment calmes et stables, sans inté­rêt pour autre chose. On dit alors que l’es­prit s’u­nit avec l’in­ten­tion, l’in­ten­tion s’u­nit avec l’éner­gie, et l’éner­gie s’u­nit à la force. Ce sont les « trois unions internes ». Si votre esprit ne s’u­nit pas avec votre inten­tion, alors, vous déca­ler de l’é­pais­seur d’un che­veu vous éloi­gne­ra de votre but (de mil­liers de kilo­mètres). Par consé­quent, si vous vou­lez apprendre cet art, vous devez vrai­ment vous investir.

Cette pos­ture est la pos­ture de contrac­tion qui donne nais­sance à San Ti Shi. La contrac­tion est réa­li­sée par les cinq arcs (bras, jambes et colonne ver­té­brale). Le prin­cipe essen­tiel des « coudes ne quittent pas les côtes, la main ne quitte pas le cœur » se mani­feste clai­re­ment comme les cinq carac­té­ris­tiques de la patte du coq, le corps de dra­gon, les épaules de l’ours, la tête du tigre et les serres de l’aigle.

La signi­fi­ca­tion est la suivante :

  1. La patte du coq : pour dif­fé­ren­cier clai­re­ment le poids et se tenir debout, tout en sai­sis­sant le sol.
  2. Le corps du dra­gon : le corps est « plié » en dif­fé­rentes par­ties, tout en res­tant uni. Rien n’est rigide mais au contraire libre comme un dra­gon qui flotte dans le ciel.
  3. Le dos de L’ours : le cou est droit et a une puis­sance ver­ti­cale (Bǎi Huì, c’est-à-dire le haut de la tête, est en train de pous­ser vers le haut). Les épaules se détendent pour que Qi coule vers le Dan Tian infé­rieur. Le dos est arron­di et la poi­trine détendue.
  4. Etreindre la tête du tigre : C’est comme un chat qui a attra­pé sa proie, c’est-à-dire en alerte et pour­tant déten­du. C’est aus­si comme un tigre qui sort de sa grotte (féroce et sans peur), où la contrac­tion se mani­feste par la posi­tion des mains.
  5. Les serre de l’aigle : L’aigle attrape sa proie avec une grande puis­sance dans ses serres, mais sans efforts achar­nés. La force de la sai­sie pro­vient du Dan Tian.

La position San Ti ou la posture San Cai  (三體桩 ou 三才桩)

San Ti Shi

Sun Lu Tang a modi­fié la posi­tion de San Ti qu’il avait apprise de Li Kui Yuan et Guo Yun Shen, après avoir voya­gé dans le Shan­xi et ren­con­tré Song Shi Rong et Che Yi Zhai qui avaient tous deux la paume avant plus ver­ti­cale. Sun Lu Tang a esti­mé que cette façon de pra­ti­quer était très conduc­trice dans le déve­lop­pe­ment de l’éner­gie interne et l’a modi­fiée en consé­quence. La pos­ture ori­gi­nelle de San Ti Shi est main­te­nant dési­gnée comme San Cai Zhuang pour dis­tin­guer les deux.

Il existe d’autres dif­fé­rences entre les deux pos­tures, c’est-à-dire.

    1. Dans San Ti Shi, le doigt du milieu et le Lao Gong s’a­lignent sur la ligne médiane, tan­dis que pour San Cai, l’in­dex et le point He Gu s’a­lignent sur la ligne médiane.
    2. Dans San Ti Shi, le corps est presque tour­né vers l’a­vant alors que dans San Cai le corps est tour­né à presque 45 degrés.
    3. Dans San Ti Shi, le poids est de 60% sur la jambe arrière, alors que dans San Cai, il est de 70% sur la jambe arrière.
    4. Dans San Ti Shi, la pointe des doigts de la main avant est au niveau des lèvres, tan­dis que pour San Cai, la main avant est au niveau du cœur.

San Cai

Tra­duc­tion de l’ar­ticle ori­gi­nel par Moham­med Saïah acces­sible en anglais sur le site de Per Nyfelt.

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